INTERVIEW LUCHA LIBRE / Part 2 : JERRY FRISSEN
Poursuivons notre voyage au sein de l'univers LUCHA LIBRE en posant quelques questions à JERRY FRISSEN, scénariste et créateur du projet, belge et demeurant dorénavant en Californie.
Il possède un excellent blog (muttpop.blogspot.com) ou il vous apprendra plein des dizaines de miliers de choses car le monsieur n'est pas né de la dernière pluie et à des goûts hautement recommandables et très variés en matière de culture graphique.
Comment se découpe l’histoire de Lucha Libre ? Le tome 1 fait la part belle aux Luchadores Five, et le tome 2 est plus centré sur Tequila. Y a t il une continuité entre les histoires ou bien faudra-t-il attendre quelques numéros avant de revenir à l’histoire des protagonistes de départ ?
Il y a en tout cinq séries, les Luchadores Five, Tequila, les Tikitis, les Luchadoritos et le Profesor Furia. Elles se chevaucheront toutes dans le magazine et elles ont toutes des liens entre elles. Dans le numéro 2, en plus du début de Tequila, il y aura la suite et la fin de la première histoire des Luchadores Five.
Le format, le découpage, le contenu de Lucha Libre est vraiment différent de la majorité de la production francophone en matière de BD, est-ce que ça a été facile de convaincre un éditeur de bd « traditionnelle » tel que les Humanos de publier ce nouveau format ?
En fait, cela n’a pas été très difficile de les convaincre, même si le format a pris des mois de discussion avant d’être décidé. Pour le contenu, j ‘ai l’impression d’avoir une liberté totale. Jusqu’à présent, personne ne m’a jamais dit que je ne pouvais pas faire ou dire telle ou telle chose.
L’humour est omni présent, très varié, très grinçant et très noir dans l’histoire principale’ du tome 1. Quelles sont les références et les inspirations pour le ton de Lucha Libre ?
C’est difficile à dire, ça vient plutôt naturellement. Mais je me sens fort influencé par des comédiens US comme Bill Maher ou George Carlin ou des séries comme les Simpsons, King Of The Hill ou Curb Your Enthousiam. Sinon, pour les influences des personnages ou de l’univers, je trouve l’inspiration dans ma vie de tous les jours et des gens que je rencontre. J’aime bien aller me promener et observer des gens bizarres.
Comment se sont faite la répartition et le choix des dessinateurs ? Est-ce que tu as créé une histoire en fonction des personnages que des dessinateurs t’avaient soumis ou bien est-ce que tu as choisi des dessinateurs pour développer des persos autour d’une histoire que tu avais créé ?
Comme je le disais, c’est un échange. Pour les Luchadores Five, j’ai les 12 premières pages avant même d’avoir parlé à Bill, mais son apport a été énorme que ce soit dans la narration ou dans la conception des personnages. Avec Gobi, c’était un peu différent. Il m’a un jour envoyé un dessin avec la première version de Tequila. Gobi est une incroyable machine a créer des personnages. J’écris Tequila en me basant sur ses personnages. Pour Fabien, on a aussi parlé avant que je ne commence a écrire. J’aime bien travailler comme ça. Et puis, pour continuer ce que je disais plus haut, je peux écrire une histoire en quelques semaines, mais eux, ils vont devoir la dessiner pendant des mois, donc, c’est important qu’ils y trouvent leur compte.
Hormis les dessinateurs oeuvrant pour l’histoire « centrale » comment cela se passe-t-il avec les autres ? Est-ce qu’ils écrivent les histoires courtes ou alors est-ce que tu scénarises aussi cette partie ?
J’écris ça aussi, mais je suis aidé par la charmante Inès Vargas.
Qu’est ce que tu penses du marché et de la qualité du comic book aux USA en ce moment ?
J’ai travaillé pour DC comme graphic designer pendant près de deux ans. Ça m’a suffit pour perdre tout l’intérêt que je pouvais y porter. Les gros éditeurs ont des philosophies d’entreprises et pas d’artistes. Parfois on recevait des mémos qui disaient des trucs genres : « Ne plus montrer de décapitations. » juste parce qu’ils passent leur temps à penser comment éviter les procès qu’on pourrait leur faire. Ils ont aussi toutes sortes de règles de malades qu’ils changent tout le temps, par exemple « a partir de telle date, on ne capitalise plus les lettres I… J’avais l’impression de bosser pour le parti communiste Chinois. Mais je continue à suivre ce qui se passe du côté de fantagraphics ou Drawn and Quartery. J’aime bien des auteurs comme Chris Ware, Dan Clowes ou Charles Burns.
Penses-tu que Lucha Libre pourrait trouver son public un peu partout notamment aux USA ? Une version en anglais est-elle prévue ?
On parle en ce moment avec deux éditeurs américains.
Comment est perçue la bande dessinée traditionnelle francophone (présente et passée) aux USA ?
C’est super respecté, mais ça se vend très mal.
Un article du New York Times disait “Comics Aren’t For Kids Anymore” est-ce que tu partages cet avis ? Penses-tu que Lucha Libre est à destination d’un public adulte exclusivement ?
En tant que lecteur, je me dis que ce n’est pas trop tôt que la presse s’en rende compte. C’est une évidence. Je dois dire que je n’ai jamais compris pourquoi les comics étaient aussi mal considérés aux USA. C’est le pays de la pop culture, des dizaines de millions de gens votent pour American Idol et lire un comics, c’est considéré comme un truc d’attardés… Pour ce qui est de Lucha Libre, en écrivant, je ne pense jamais a qui je m’adresse. Mais en y réfléchissant, mon fantasme serait d’arriver à quelque chose comme les Simpsons avec plusieurs niveaux de lectures. Je regarde ça avec ma fille de 10 ans, on aime tout les deux et je suis sur qu’ont y voit deux trucs bien différent.
Combien de tomes sont prévus pour Lucha Libre ? Y a-t-il une limite et une fin envisagée ou bien est-ce un projet libre qui peut évoluer librement ?
A priori, c’est sans limite. Jusqu’à ce qu’on en ait marre.
Comment est venue l’idée de sortir des figurines et un site web assez énigmatique (luchalibre.fr) plusieurs mois avant la publication ?
Le site web, c’est la responsabilité des Humanos. Je n’ai pas grand chose a en dire. Les jouets, par contre… Quand un des mes amis, Robert Silva, a vu les dessins de Bill et Gobi, il a flashé et m’a convaincu de quitter mon boulot, de créer Muttpop et d’acheter la licence pour les droits dérivés de Lucha Libre aux Humanos. Notre but est de développer Lucha Libre dans plusieurs domaines et commencer par des jouets vinyls nous a semblé un premier pas logique. On a donc commencé par Tequila et El Panda de Gobi, Red Demon de Bill est actuellement en production. Nous en avons deux autres en cours de sculptures, Dr. Destruction de Bill et King Katch de Fabien. Frank Kozik va continuer a faire une version de chaque.
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